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Déterminer le caractère Envahissant des espèces Non-Indigènes Marines Métropolitaines

Démarrage du Projet DENIM porté par l’Ifremer

Macrophotographie d’une communauté de biofouling prise en Méditerranée où l’on aperçoit le bryozoaire Watersipora sp., ainsi que des vers marins (Serpulidae et Spirorbiidae). © Ifremer / O. Dugornay

Contexte

En milieu marin, la prévention est la clé pour gérer les espèces exotiques envahissantes (EEE) marines. Il est donc crucial d’anticiper les lieux des introductions et expansions des espèces non-indigènes (ENI) marines avant qu’elles ne deviennent des EEE, et d’identifier celles ayant les plus grands potentiels d’expansion. Dans une étude récente (Massé et al. 2023), il a été montré que 239 des 342 (~70%) ENI marines répertoriées dans les eaux côtières de la France métropolitaine, sont trouvées en Méditerranée. Parmi celles-ci, 107 sont exclusivement présentes en Méditerranée. La Méditerranée occidentale est un Hotspot du changement climatique auquel s’ajoute l’arrivée de nombreuses espèces d’origine lessepsienne, qui se propagent d’est en ouest à travers la Méditerranée avec le réchauffement des eaux (Zenetos et al., 2022).

La Méditerranée, et la côte languedocienne en particulier, sont également des hotspots pour la navigation de plaisance. Véritable laboratoire à ciel ouvert, les ports abritent des communautés originales, souvent métissées entre des taxons qui n’auraient pas pu se rencontrer naturellement (Touchard et al., 2022). Les nombreux substrats durs et artificiels servent de pas japonais pour ces espèces, et expose à un risque d’accélération de l’expansion secondaire des EEE marines de ces substrats. Selon le niveau de perturbation, les ports peuvent donc héberger une biodiversité plus importante que les zones peu urbanisées et cela associé à un changement radical des communautés, avec la présence d’ENI, mais aussi d’espèces tolérantes au stress ou synanthropiques. Les mécanismes associés à ces « patterns » de biodiversité urbaine sont néanmoins complexes et restent peu étudiés (Faeth et al., 2012). C’est en comparant les traits de vie des communautés de faune sessile des substrats durs, naturels et artificiels, que le projet DENIM, démarré en décembre 2024 et pour une durée de 2 ans, permettra de déterminer la distance fonctionnelle entre les ENI et leurs milieux (Su et al., 2023).

L’approche de modélisation proposée dans le projet vise à étudier la dynamique d’expansion des EEE, et prédire les zones les plus propices à l’établissement d’EEE le long de la façade Méditerranéenne, actuellement et dans le futur.

Objectifs suivis

Le projet a pour but principal de combler les lacunes de connaissance autour de la prédiction du caractère envahissant des ENI chez les invertébrés marins formant les biosalissures (« biofouling »), dans un contexte de changement climatique. DENIM ne s’intéresse donc pas à un taxon particulier mais à l’ensemble de la faune d’invertébrés sessiles colonisant les substrats durs naturels ou artificiels (navire, port, éolienne…) dominants dans les hotspots d’introductions notamment les ports. Les embranchements des ascidies et bryozoaires sont concernés, ainsi que certains crustacés (i.e. balanes), mollusques et annélides tubicoles.

Même si le projet DENIM porte en particulier sur l’Habitat naturel d’Intérêt Communautaire (HIC) 1160 « Grandes criques et baies peu profondes » et qu’il se focalise sur les fonds rocheux méditerranéens, naturels et artificiels, des étages allant du supra- à l’infralittorale côtier,  les entrées des milieux lagunaires aménagés (graus et espace portuaire et marinas associés) sont des sites d’intérêt pour le projet.

Le projet s’articule donc autour de trois résultats principaux :

Les résultats permettront de développer

Fonctionnement du projet DENIM

La gouvernance du projet DENIM sera assurée par l’Ifremer et le CEN Occitanie, qui coordonnent les instances de suivi du projet. Un comité de pilotage associe les principaux partenaires scientifiques (Frédérique Viard – ISE-M) et les décideurs (ex. OFB, DREAL, Parc Naturel Marin du Golfe du Lion).

Une communication externe sera maintenue tout au long du projet, grâce au site du pôle-relais lagunes méditerranéennes, à sa newsletter la lettre des lagunes, ainsi que grâce à la newsletter du CEN Occitanie relative à la stratégie EEE.

La levée de données d’observations des communautés sessiles des substrats durs sera assurée par le CEN Occitanie en lien avec les structures de gestion des parcs marins, réserves naturelles, et sites N2000 littoraux et maritimes qui recevront et relayeront l’enquête auprès de leurs contacts territoriaux concernés. Ils seront également utilisateurs des productions du projet. La levée de données environnementales et d’activités humaines sera assurée par l’Ifremer (avec appui possible du CEN Occitanie pour les données de lagunes).

Un atelier/webinaire de restitution finale des résultats, ouvert à des scientifiques extérieurs et à des structures de la sphère opérationnelle (gestionnaires d’aires marines protégées, d’espaces naturels, de zones portuaires, collectivités littorales, bureaux d’études, …) sera proposé en fin de projet.

 

Amelia Curd
Chercheur en écologie benthique, à l’Ifremer de Plouzané
[email protected] [1]

Iris Lang
Chargée de projet scientifique Espèces exotiques envahissantes (EEE) Faune au CEN Occitanie
[email protected] [2]