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Evolution des communautés phytoplanctoniques en réponse à la restauration écologique des lagunes méditerranéennes

Thèse d’Amandine Leruste, réalisée au laboratoire Ecologie des SYstèmes Marins côtiers ECOSYM (34)

Date de publication : Novembre 2013

Depuis 2003, des mesures de restauration écologique des lagunes côtières ont été instaurées. L’émissaire de Maera (station d’épuration de l’agglomération montpelliéraine) a notamment permis une réduction de 60% des apports aux lagunes du complexe palavasien depuis 2006. Le phytoplancton étant le 1er compartiment autotrophe (capable de produire de la matière organique à partir de matière inorganique et d’une source d’énergie externe telle que le rayonnement solaire, et premier maillon de la chaine alimentaire) à répondre à ces réductions, il constitue un outil cohérent pour évaluer la dynamique de restauration écologique de ces écosystèmes.

Amandine Leruste a obtenu une bourse de l’école doctorale SIBAGHE [1] en juin 2012 et réalise un travail de recherche au laboratoire Ecosym [2] depuis octobre 2012 pour préparer une thèse focalisée sur les trajectoires d’évolution de ces communautés phytoplanctoniques.

 

Des écosystèmes lagunaires fragiles

Depuis 2003, des efforts de gestion ont été mis en œuvre sur certaines lagunes pour réduire drastiquement les apports nutritifs des bassins versants. Cette réduction des apports vise à lutter contre leur eutrophisation et à contribuer à la reconquête du “bon état écologique” des milieux aquatiques tels que le prévoit la Directive Cadre sur l’Eau d’ici l’horizon 2021 (DCE 2000/60/CE). En particulier, le complexe des étangs palavasiens a vu ses apports nutritifs se réduire de près de 60% suite au détournement (en décembre 2005) des rejets des eaux de la station d’épuration de l’agglomération de Montpellier (MAERA) à 11 km au large en Mer Méditerranée. Ces écosystèmes ayant subi durant de nombreuses années des apports nutritifs excessifs sans pouvoir les assimiler sont depuis peu entrés dans une nouvelle dynamique, en particulier le compartiment phytoplanctonique (Malet et al., 2011, Bec et al., ICES 2011). Or si les processus d’eutrophisation et leur impact sur la qualité et le fonctionnement écologique des lagunes sont bien connus, les processus inverses de réhabilitation et de restauration dans des systèmes littoraux fortement dégradés ont rarement été étudiés. Quelques études menées dans des écosystèmes côtiers suggèrent qu’il est peu probable que les écosystèmes engagés intentionnellement dans un processus de restauration puissent retourner à leur état d’origine historique (Elliott et al., 2007, Duarte et al., 2008). Les trajectoires de restauration ne sont donc pas réversibles, notamment en raison des stocks sédimentaires de nutriments (voir également le projet Restolag [3]), et de ce fait, les lagunes devraient s’orienter vers un nouvel état selon une trajectoire et une durée encore méconnue.

 Image microscopique du phytoplancton, exemple d’un bloom de Diatomées Chaetoceros sp. 

Image microscopique du phytoplancton, exemple d’un bloom de Diatomées Chaetoceros sp., ECOSYM.

Objectifs de la thèse

L’objectif de ce projet doctoral est de caractériser la trajectoire évolutive d’écosystèmes lagunaires dégradés engagés dans un processus de restauration, au travers de la structuration et de l’évolution de la biodiversité phytoplanctonique. Le phytoplancton étant le premier compartiment autotrophe à réagir aux modifications de l’environnement nutritif, son étude nous permet d’appréhender les réponses initiales du milieu aux processus de restauration écologique.

Le travail de thèse se divise en plusieurs axes :

Le premier consiste en une analyse des bases de données mensuelles acquises dans le cadre du Réseau de Suivi Lagunaire [4] (RSL), de 2006 à 2013 dans les huit lagunes du complexe palavasien. Ces lagunes sont caractérisées par des niveaux d’eutrophisation contrastés (de la méso- à l’hypertrophie), du fait de fortes dégradations de part la présence du canal du Rhône à Sète qui les traverse d’est en ouest, de part l’embouchure de cours d’eau anthropisés à l’est (le Lez et la Mosson) et anciennement des rejets de la station de traitement des eaux usées de l’agglomération de Montpellier dans le Lez. Nous pourrons ainsi répondre aux questions relatives à l’évolution depuis la mise en place de MAERA des communautés phytoplanctoniques et chercher à évaluer l’impact de l’état d’eutrophisation initial des lagunes sur les processus de restauration.

Le second consiste en une étude plus poussée des mécanismes fonctionnels qui régissent la structuration des communautés phytoplanctoniques selon l’état d’eutrophisation de la lagune. En premier lieu, nous nous appuierons sur des prélèvements effectués à une fréquence mensuelle de 2013 à 2015 dans trois lagunes présentant un statut trophique particulier :

–          l’étang d’Ingril Nord, le moins eutrophisé (mésotrophe) des étangs palavasiens ;

–          l’étang de Méjean Ouest, le plus eutrophisé (hypereutrophe) des étangs palavasiens ;

–          l’étang d’Ayrolle (oligotrophe) définie comme « état de référence » vers lequel devraient tendre les lagunes en voie de restauration.

Dans un second temps, des expérimentations au sein de ces lagunes seront effectuées afin d’estimer les taux de croissance des différents groupes phytoplanctoniques en fonction de conditions nutritives variées (saturantes ou limitantes en azote et en phosphore) au cours des trois périodes contrastées d’une année hydrologique (automne, printemps et été). Les résultats obtenus dans cet axe permettront d’étudier les stratégies adaptatives des groupes fonctionnels du phytoplancton, notamment en termes d’exploitation des ressources nutritives, selon la disponibilité en nutriments (N et P) et ainsi d’expliciter les mécanismes de structuration des communautés phytoplanctoniques dans les lagunes engagées dans un processus de restauration.

 Dispositif de mésocosmes pour expérimentation in situ, Station Méditerranéenne de l’Environnement Littoral, MEDIMEER (Sète). 

Dispositif de mésocosmes pour expérimentation in situ, Station Méditerranéenne de l’Environnement Littoral, MEDIMEER (Sète).

Amandine s’est également engagée dans une collaboration avec des collègues travaillant sur des thématiques similaires sur les lagunes de Corse. Ainsi, Nathalie Malet (Ifremer, Bastia) a contribué depuis le début à la proposition de ce sujet de thèse et participe activement à son co-encadrement. La collaboration inclut également des collègues et un doctorant de l’Université de Corse, et des expériences comparables sont menées conjointement depuis novembre 2013 en Corse (Biguglia) et en Languedoc-Roussillon (Méjean et Ayrolle).

 

Thèse : « Trajectoires d’évolution des communautés phytoplanctoniques au cours du processus de restauration écologique des milieux lagunaires méditerranéens »

Directeurs de thèse : Béatrice Bec et Rutger de Wit

 

Amandine Leruste

Doctorante, UMR5119 ECOSYM

Place Eugène Bataillon, 34090 MONTPELLIER Cedex 5

Tel. : 04 67 14 32 19 [5]

Mail: [email protected] [5]