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La mer monte

Voyage d’étude pour quinze agents de la province de Hollande-Septentrionale (Noord-Holland) dans la région de Montpellier du 17 au 21 avril 2023.

Nous savons tous que le climat change et que nous devons nous y préparer.

Mais la question qui se pose est la suivante : comment ?

Bien que les Hollandais soient bien conscients du risque des submersions marines et que le pays ait mis en place une protection par digues avec une gestion précise de la quantité d’eau depuis des siècles, les changements planétaires posent de nouveaux défis pour la gestion et l’aménagement de leurs territoires. Il est donc très intéressant pour eux d’étudier les solutions qui sont expérimentées à l’étranger pour s’en inspirer et croiser leurs regards avec ceux des collègues.

Au printemps dernier, l’Université de Montpellier, sur proposition de Rutger De Wit[1] [1], a invité une délégation de la province de Hollande-Septentrionale et lui a présenté des projets d’adaptation climatique dans la Métropole de Montpellier, sur les lagunes Palavasiennes et en Camargue. En outre, une série de présentations orales, des discussions avec les gestionnaires et les scientifiques ont permis d’échanger de nombreuses connaissances et expériences.

Pour les Néerlandais, il était très impressionnant de voir que les effets du changement climatique autour de la Méditerranée sont très clairs et palpables. Bien plus que dans leur propre pays. Le texte ci-après rend compte de leurs impressions et opinions.

La sécheresse

Le volume des précipitations et l’approvisionnement en eau des rivières ont considérablement diminué. La sécheresse était très visible en Camargue au début du printemps. Une grande différence avec les Pays-Bas où, au contraire, les précipitations sont légèrement plus abondantes et mieux distribuées le long de l’année. Dans le sud de la France les précipitations sont principalement sous forme d’averses en automne et l’hiver entrecoupées de longues périodes sèches et particulièrement chaudes pendant l’été. Ainsi, il y a un vrai déficit hydrique pendant l’été. Pour les Pays-Bas, qui sont aussi de plus en plus concernés par les sècheresses estivales, il s’agit avant tout de stocker l’eau et non de l’évacuer le plus rapidement possible. En d’autres termes, il s’agit de constituer des réserves. Sans ces réserves, cette région manquera bientôt d’eau douce et il n’y aura plus rien à distribuer.

Érosion côtière

Une grande partie des Pays-Bas se trouve sous le niveau de la mer et est protégée par des digues. Les Waterschappen (syndicats de l’eau) sont des organisations qui traditionnellement se consacraient exclusivement à la gestion de la quantité de l’eau et qui aujourd’hui sont aussi responsables de la protection de la qualité de l’eau. À cette fin, ils sont autorisés à prélever des taxes de manière indépendante. L’aspect technique de la gestion de l’eau est très bien organisé.

En Camargue, ils ont découvert un projet où une zone de 6 000 hectares a été abandonnée par la saliculture. Les tempêtes et l’érosion côtière ont engendré une augmentation des coûts liés à la gestion des digues pour les exploitants de sel. La zone abandonnée a été acquise par le Conservatoire du littoral et dorénavant gérée comme réserve naturelle, avec les buts de rénaturalisation et d’adaptation à la montée des eaux. Ce site fournit ainsi beaucoup de connaissances sur les processus côtiers plus naturels soumis aux effets naturels des coups de mer et à la progression du milieu marin dans le delta camarguais.

Lors des différentes présentations sur ces processus côtiers, la situation après 2100 a été régulièrement discutée, avec des scénarios dans lesquels des parties de la côte sont abandonnées. Les Néerlandais ont expliqué que dans leur pays ils parlent rarement de la période après 2100 et que la solution l’abandon de terres n’est presque jamais envisagée. Il était intéressant d’entendre comment cette discussion est menée dans la région et peut-être judicieux de faire de même pour la situation néerlandaise.

De la lutte contre les moustiques à la santé selon l’approche « One Health » (Une seule santé)

Il existe une longue tradition de recherches sur les moustiques dans la région côtière du Sud de la France. Au départ, l’accent était mis sur les problèmes que les moustiques posent au développement du tourisme côtier. La recherche s’est principalement concentrée sur l’écologie et la lutte contre ces moustiques. Avec le réchauffement climatique et la mondialisation, de plus en plus de moustiques tropicaux ont la possibilité de s’établir dans la région et de propager de nouvelles maladies infectieuses. La surveillance des nouveaux moustiques, comme notamment le moustique tigre, et de leurs maladies est bien organisée et donne des résultats inquiétants. Il semble qu’ils se répandent de plus en plus au nord et que les Pays-Bas ne tarderont pas à devoir faire face aux maladies qui étaient cantonnées aux zones tropicales jusqu’à il y a peu de temps encore.

À l’université, les Néerlandais ont assisté à une présentation détaillée de l’approche One Health, qui englobe la santé et l’équilibre de l’homme, de l’animal et de l’écosystème. Les conséquences du changement climatique, de la mondialisation et de l’évolution des zoonoses ont été calculées pour la région proche de la Camargue. La transposition de ces processus globaux à une région montre comment ils peuvent se renforcer mutuellement. Une telle analyse peut aider à concevoir des mesures efficaces et, surtout, à éviter les erreurs sectorielles.

Dans la province Noord-Holland, territoire densément peuplé et excessivement mondialisé, l’approche « une seule santé » n’est pas encore utilisée. Les exposés à l’université leur a donné beaucoup d’enseignements et des enjeux à réfléchir.


[1] [2] Rutger De wit, chercheur MARBEC à Montpellier, contact : [email protected]