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Résilience et adaptation au changement climatique des dunes du Parc National de Zuid-Kennemerland (Pays-Bas)

Redonner une dynamique dunaire favorable au maintien des ressources naturelles et des services écosystémiques

Date de publication : 24/11/2015

Les systèmes dunaires des Pays-Bas protègent l’intérieur des terres du risque côtier. La réserve de dunes de la Hollande du Nord (NHD) et la réserve de dunes de Kennemer, sont deux réserves naturelles intégrées au réseau Natura 2000. Constituées de dunes grises, de dunes blanches, de dépressions humides arrière-dunaires et de forêts dunaires, ces systèmes dunaires sont la source de 50% de la biodiversité des Pays-Bas, et sont appréciés comme support d’activités récréatives (et naturalistes). D’autre part, ces milieux dunaires sont également connus et gérées pour leur ressource en eau potable.

Dès la fin du 19ème siècle l’eau des dunes était extraite par des compagnies municipales pour subvenir aux besoins des populations dans les villes. Dans les années 20, PWN (Provinciaal Waterleidingbedrijft van Noord-Holland, Provincial Water Supply Company of North Holland) a d’abord été créé comme une compagnie de gestion de la ressource en eau potable, puis dès 1934 il a eu en charge la protection des milieux dunaires et gère actuellement 7290 ha de réserve de dunes.

Au milieu du 20ème siècle, il est apparu clairement que l’extraction de l’eau depuis ces dépressions dunaires était excessive et que le réapprovisionnement de ces zones humides par les précipitations annuelles devenait insuffisant.

La balance naturelle étant perturbée dans ces dépressions dunaires, de l’eau saumâtre à salée en était extraite, et il était observé que les espèces végétales et animales inféodées à ces zones humides disparaissaient. Face à ce constat des projets d’infiltration de l’eau pré-purifiée venant des rivières ont été réalisés dans une partie des dunes, et en même temps l’extraction d’eau souterraine a été réduite. Aujourd’hui la surface d’infiltration de ces eaux pré-purifiée représente 5% de la surface des Dunes de la Province Nord de la Hollande et des mesures ont également été prises pour améliorer la qualité écologique des travaux d’infiltration.

Là où l’extraction s’est arrêtée, elle a laissé la place à une restauration des dépressions humides arrière-dunaires.

 

 

Le retour aux dynamiques côtières dans le Parc National Zuid-Kennemerland, une gestion des dunes blanches  

Les systèmes dunaires nécessitaient une gestion particulière, d’une part pour préserver le cordon dunaire comme élément de défense contre la mer, d’autre part pour lutter contre la dégradation des dunes grises calcaires qui, en conséquence des précipitations enrichies en azote, ont été rapidement envahies par la végétation et se sont acidifiées avec le temps. Les dunes du parc Zuid-Kennermerland, a bénéficié du projet Life+ « Dutch Dune Revival » entre 2011 et 2013, tout comme deux autres sites dunaires de Hollande. C’est grâce à ce programme que le lien entre la plage et le système dunaire a pu être recréé permettant ainsi le retour à une dynamique dunaire fonctionnelle.

Sans dynamique ces dunes ne sont pas résilientes face au climat
    

 

Dans le parc de Kennemerland, une partie du projet visait à élargir et restaurer les habitats de dunes grises, de dunes blanches, des dépressions humides d’arrière-dunes et la forêt dunaire, mais aussi d’accroître le nombre d’espèces rares et caractéristiques associés à ces habitats. L’objectif global était de retrouver l’état antérieur à la succession écologique qui était observée et de redonner ainsi de bonnes conditions pour le développement d’habitats plus riches en espèces. Durant la dernière décennie le milieu s’est fermé du fait de l’embroussaillement, de la forêt et de la végétation herbacée apparus sur le cordon dunaire, et seulement quelques espèces de plantes caractéristiques des dunes y étaient présentes. L’élimination (mécanique) de cette végétation a été la partie la plus importante du projet de renaissance dunaire.

La dynamique dunaire a également été rétablie pour obtenir le retour des dunes grises qui protègent l’intérieur des terres de la montée du niveau de la mer.

La méthode appliquée a consisté à creuser 5 tranchées de 100 à 150 m de large, en forme de V à plusieurs endroits du système dunaire proche de la mer, afin de recréer sous l’effet du vent la dynamique dunaire attendue. Le transport du sable et des embruns salés se faisant depuis l’avant-dune a permis de réactiver l’accrétion naturelle de la dune parabolique et par la suite de recréer de bonnes conditions pour le développement d’une nouvelle dépression dunaire humide. L’éolisation du sable depuis le cordon de dune mobile se poursuit pour former ensuite une dune grise. Le mouvement du sable à échelle suffisante garantira que la dune est renouvelée, ne vieillit pas, ni s’acidifie.

Quand la dune parabolique se déplace, des creux sont créés sur la face exposé au vent jusqu’à atteindre la nappe d’eau souterraine. Avec le changement climatique, si le niveau de la nappe phréatique de la dépression dunaire s’élève, la hauteur de la dépression croît avec lui, et l’écart est maintenu. Cela est important au regard des changements futurs si le niveau de la nappe phréatique change en raison de l’élévation du niveau de la mer et du régime des précipitations. Avec la prédiction climatique d’une élévation du niveau marin de 35-85 cm d’ici 2100, les dépressions arrière-dunaires proches du rivage deviendront plus humides et auront davantage d’eau libre en permanence. Suivant l’atlas climatique du nord de la Hollande, les précipitations vont également augmenter et pourraient être de 50 mm, soit une variation moyenne dans la nappe phréatique de 15 cm approximativement.

 

D’autre part, du point de vue des suivis réalisés sur la faune et la flore, le changement climatique semble déjà bien visible au sein des parcs dunaires. Les espèces du sud ont progressé et les espèces végétale comme animales émergent plus tôt dans l’année. Néanmoins une bataille est constante dans le système dunaire entre la progression du sable et celle de la couverture végétale. Si le changement climatique contribue à l’allongement de la saison de croissance végétale, les plantes auront plus de temps pour constituer leurs réserves dans leur système racinaire venu l’hiver et le sable aura d’autant plus de mal à vaincre la végétation en place…ayant pour conséquence le verdissement des dunes. Mais ce développement de la végétation dépend principalement des périodes de sécheresse qui seront prédites. Si, en effet celles-ci deviennent plus longues et fréquentes il s’en suivra que la balance penchera plutôt à la faveur du sable.

La vision du gestionnaire du site (PWD) est à l’avenir de poursuivre l’effort de protection de ces dunes vitales et écologiquement  résilientes, permettant de maintenir leur biodiversité et le caractère défensif face au changement climatique. L’objectif est également d’intégrer de façon durable l’extraction de l’eau et les activités récréatives dans la gestion des dunes afin de préserver la nature, le paysage et  l’héritage culturel sur le long terme.

 

Extrait des documents transmis par Léon Terlouw, Conseiller Nature, PWN, Compagnie de distribution d’Eau de la Province Nord de Hollande (PWN) : « Revitalising Dunes in Kennermerland. Dynamic nature conservation in a large urban setting [1]

Images issues de la présentation de L. Terlouw [2] réalisée dans le cadre de la conférence internationale EUCC-France, 22-23 juin 2015, à Biarritz