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Retour sur le dernier séminaire du RSL

Près de 40 participants réunis le 4 avril 2014 à Montpellier (34)

Date de publication : 16/09/2014

Un dernier séminaire pour cloturer le RSL

La richesse de la frange côtière du Languedoc-Roussillon et son originalité sont dues au chapelet de lagunes qui s’étendent de l’embouchure du Rhône à la frontière espagnole. Ces milieux, soumis à des pressions anthropiques multiples, constituent le réceptacle des apports de leur bassin versant et connaissent une grande sensibilité aux phénomènes de pollution, dont la plus visible est l’eutrophisation. Cette problématique d’eutrophisation en lagunes, et plus largement la dégradation de ces écosystèmes remarquables, a été pointée du doigt dès les années 80 compte tenu de ses conséquences économiques sur les activités conchylicoles, sur la pêche et sur le tourisme.

Aussi, suite à l’étude sur les indicateurs trophiques en lagunes, un partenariat entre le Conseil Régional du Languedoc-Roussillon, l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, l’Ifremer et le Cépralmar, a permis la mise en œuvre du Réseau de Suivi Lagunaire (RSL) en l’an 2000. Centré sur un double objectif – suivi de l’eutrophisation et aide à la gestion, le réseau a permis à la fois le suivi de l’état des lagunes vis-à-vis de l’eutrophisation et l’approfondissement et la mise en commun de savoirs entre partenaires scientifiques et techniques pour soutenir les gestionnaires dans leur volonté de reconquête une bonne qualité des eaux.

Depuis lors, la qualité des milieux lagunaires vis-à-vis de l’eutrophisation a progressé sur la quasi-totalité des lagunes suivies. Cette restauration fait suite aux efforts de gestion et aux investissements réalisés par les collectivités dans l’objectif de maîtriser les apports en éléments nutritifs aux lagunes ; en particulier sur les équipements de traitement collectif des eaux usées.

Au cours des deux programmes RSL (2000-2006 et 2007-2013), le travail itératif d’échange et de confrontation des connaissances des scientifiques aux besoins et remarques des gestionnaires, nécessaire à l’élaboration des outils d’aide à la décision, a permis de soulever de nouvelles questions. Ce réseau a pris fin avec l’année 2013, et n’est pas reconduit.

Un dernier séminaire organisé par le RSL a eu lieu en avril 2014, dans les locaux de la Région Languedoc-Roussillon. Il visait à présenter les résultats d’études récentes sur la qualité des eaux des lagunes (eutrophisation, contamination chimique) et les processus de restauration, avec comme fil conducteur la logique Etat/Pressions/Réponse.

 

Evolution de l’état de la colonne d’eau des lagunes vis-à-vis de l’eutrophisation (étude statistique des résultats du RSL 2001-2012)

L’objectif de cette étude a été de mettre en évidence des trajectoires d’évolution des lagunes vis-à-vis de l’eutrophisation de façon plus fine que l’analyse réalisée au travers de la grille RSL. En effet, l’application du code couleur du RSL (du rouge au bleu en fonction de l’état de l’eau vis à vis de l’euthrophisation) permet de matérialiser les évolutions importantes de la qualité des eaux vis-à-vis de l’eutrophisation, alors que les différents paramètres biologiques et physico-chimiques d’une lagune peuvent s’améliorer sans induire forcément un changement de classe de qualité.

Ainsi,des analyses descriptives multidimensionnelles (Analyses en Composantes Principales (ACP)) de la donnée brute acquise au cours de la période 2001-2012 dans le cadre du RSL ont été réalisées :

L’objectif a été d’identifier les paramètres qui expliquent le mieux la variabilité des données.

Figure 1 : ACP sur les données annuelles (7 stations, 2006-2012)

Cette approche permet également de visualiser les variables, les stations, les années au sein d’un repère en deux dimensions. La représentation des stations aux différentes années illustre les trajectoires (restauration, stabilisation, dégradation) des lagunes vis-à-vis de l’eutrophisation au fil du temps.

Figure 2 : Représentation des années sur le repère de l’ACP (Méjean Ouest)

Cette étude a confirmé la pertinence des paramètres retenus pour réaliser les diagnostics ainsi que des suivis estivaux du RSL (vs. Suivi mensuel) pour différencier les stations selon leur état vis-à-vis de l’eutrophisation.

Ce travail montre également que les données acquises dans le cadre des diagnostics RSL de l’état de la colonne d’eau vis-à-vis de l’eutrophisation permettent de mettre en avant des trajectoires de restauration. Ainsi l’étude expose que près de la moitié des stations diagnostiquées suivent une trajectoire de restauration sur la période 2001 à 2012, dont par exemple, les lagunes de Bages-Sigean, de Thau et les étangs palavasiens.

 

Analyse statistique des données du RSL – Etude des trajectoires écologiques des lagunes entre 2001 et 2012. Derolez Valérie, Ouisse Vincent, Fiandrino Annie, Munaron Dominique, Bissery Claire, Kloareg Maela (2013). http://archimer.ifremer.fr/doc/00173/28423/ [1]

 

PEPSLAG (Projet Echantillonneurs Passifs pour la Surveillance de la contamination chimique des LAGunes méditerranéennes) en LR et PACA

Tandis que grâce aux travaux du RSL, l’état des lagunes du Languedoc-Roussillon vis-à-vis de l’eutrophisation est aujourd’hui bien connu, ce n’est par encore le cas concernant les contaminants chimiques.

Aussi, l’objectif de Pepslag est de caractériser le niveau d’exposition des lagunes aux contaminants chimiques présents dans la colonne d’eau, complétant ainsi notre connaissance de la qualité des masses d’eau côtières méditerranéennes françaises. 23 masses d’eau de transition en Languedoc-Roussillon et PACA ont été échantillonnées au moyen d’échantillonneurs passifs (SBSE[1] [2], POCIS[2] [3] et DGT[3] [4]) entre mai et août 2010. Les échantillonneurs passifs sont des outils inertes qui permettent de mesurer la concentration moyenne dans l’eau de différentes familles de substances toxiques, en accumulant les contaminants chimiques pour lesquels ils possèdent une affinité.141 contaminants issus de différentes familles chimiques (pesticides, médicaments, alkylphenols, HAP, PCB et métaux traces) ont été recherchés et leurs teneurs comparées aux Normes de Qualité Environnementales (NQE[4] [5]), lorsque celles-ci existent.

Les résultats sont préoccupants: 20 masses d’eau de transition sur les 23 suivies sont considérées comme étant en mauvais état chimique à cause de ces polluants, dont 19 en raison d’un insecticide organochloré.

Cette campagne d’échantillonnage révèle une contamination chimique ubiquiste dans les lagunes, présente sous forme de mélanges de substances généralement à l’état de traces. Cependant, les éléments recherchés présentent une forte variabilité de concentrations au cours du temps qui peut être due à la variabilité de la contribution des différentes sources (apports nouveaux / remobilisation de stocks interne). Si un grand nombre de molécules a été identifié dans les lagunes, de nombreuses inconnues demeurent quant à leurs effets sur les organismes.

Figure 3: molécules identifiées par les POCIS dans les lagunes du bassin RMC en ng/L

PEPS LAG: Projet Echantillonneurs Passifs pour la Surveillance de la contamination chimique des LAGunes méditerranéennes. Munaron Dominique, Hubert Morgane, Gonzalez Jean-Louis, Tapie Nathalie, Budzinski Helene, Guyomarch Julien, Andral Bruno (2013). http://archimer.ifremer.fr/doc/00134/24495/ [6]  

 

Base de données pressions (Agence de l’eau RMC)

La DCE est construite sur des cycles de 6 ans, chaque cycle nécessite une révision des différentes étapes de construction. La révision de l’état des lieux implique l’évaluation du RNAOE (risque de non atteinte des objectifs environnementaux) pour chaque masse d’eau du bassin. Pour ce faire, une mise à jour des pressions exercées sur les milieux aquatiques a été réalisée. Ces données seront regroupées dans  une base de données globale des pressions (tous milieux confondus) qui sera accessibles sur le site du SIE Rhône Méditerranée [7]. L’objectif de la démarche est de caractériser les liens entre l’état des milieux (indicateurs de qualité écologique DCE) et les pressions existant sur les bassins versants et d’identifier les pressions les plus impactantes.

Ce travail a permis de constituer une base de données homogène sur les lagunes et d’actualiser l’estimation des apports en nutriments. Il permet, comme le nécessite l’état des lieux DCE, de discriminer les lagunes les unes par rapport aux autres et d’identifier les principales sources d’apport. Par conséquent, il est nécessaire de considérer ces éléments de lecture du territoire comme un appui aux réflexions relatives à la maîtrise des sources de pollution et non comme une estimation des flux déversés aux lagunes (évaluation sommaire de certaines métriques, événements météo non intégrés, aucun coefficient d’abattement appliqué).

Afin de progresser sur la connaissance des apports de nutriments aux lagunes, l’Agence de l’eau RMC mène une étude visant à :

A terme, la démarche d’estimation des flux arrivant aux lagunes permettra de mesurer les apports en nutriments du bassin versant en complément de l’évaluation de l’état  écologique du milieu, qui peut présenter une inertie importante. Les données de flux alimenteront l’outil O’GAMELag développé dans le cadre du RSL (cf. ci-dessous). En effet, l’évaluation des flux sur un territoire doit permettre de progresser sur l’estimation des flux admissibles des milieux lagunaires. Le suivi concernera les principaux cours d’eau tributaires des lagunes du bassin RMC (hors canaux).

 

O’GAMELAG (Outil pour la Gestion et l’Aménagement des Milieux LAGunaires Eutrophisés)

O’GAMELag est développé depuis 2009 par l’Ifremer et le laboratoire ECOSYM (Université Montpellier 2) dans le cadre des innovations méthodologiques du Réseau de Suivi Lagunaire (Télécharger le guide méthodologique [8])

L’outil GAMELAG, destiné aux gestionnaires des milieux lagunaires permet, sur la base d’analyse de scénarios, d’estimer les charges maximales en azote et phosphore qu’une lagune peut tolérer tout en satisfaisant aux exigences du « bon état écologique » au sens de la DCE.

Afin de pouvoir tester différents scénarios de gestion du territoire et de la lagune, l’outil nécessite des données de forçage spécifiques à chaque territoire (notamment les apports en eau et nutriments par les bassins versants).

L’utilisation de l’outil et la définition des scénarios doivent se faire en concertation avec les acteurs du territoire au regard des objectifs spécifiques de chaque lagune (préservation des écosystèmes, conchyliculture, pêche, activités nautiques de loisir…). Des priorités d’intervention pourront ainsi être définies suite aux travaux réalisés sur le bassin versant.

Néanmoins, avant d’envisager un transfert de l’outil aux gestionnaires, il est nécessaire de quantifier l’incertitude sur les produits de sortie du démonstrateur et d’affiner la description des mécanismes qui participent au cycle de l’azote et du phosphore dans les lagunes méditerranéennes.

Au regard de ces éléments, l’accent est aujourd’hui mis sur le caractère intégrateur des connaissances de l’outil, sa mise à disposition des gestionnaires est suspendue.

 

RESTOLAG/ DEPART : Restauration des écosystèmes lagunaires : évaluation du rôle du sédiment et des herbiers à phanérogames

L’azote et le phosphore accumulés dans les sédiments depuis de nombreuses années tendent à freiner la restauration des milieux lagunaires vis-à-vis de l’eutrophisation et ainsi à retarder l’atteinte du bon état écologique au sens de la Directive Cadre sur l’Eau. Afin de mieux comprendre le rôle de ces stocks sédimentaires et des herbiers de phanérogames dans les échanges sédiments/eau, huit stations réparties le long du gradient d’eutrophisation des lagunes méditerranéennes ont été suivies en avril, juillet et novembre 2012 et février 2013 dans le cadre des études RESTOLAG et DEPART (IFREMER/UM2-ECOSYM/ Agence de l’eau RMC/Région LR/EC2CO). Pour les stations les plus eutrophisées, le compartiment benthique est une source d’azote et de phosphore pour la colonne d’eau tout au long de l’année. Les stations les moins eutrophisées, abritant également des herbiers, piègent en revanche de l’azote et du phosphore provenant de la colonne d’eau.
Figure 4 : Dispositif utilisé dans le programme RESTOLAG

Si le temps de restauration des lagunes est en partie conditionné par le relargage des stocks sédimentaires, la capacité du milieu à exporter l’azote et le phosphore vers les milieux ouverts module également la durée nécessaire à l’atteinte du bon état écologique.

Cette deuxième voie complémentaire de restauration est en cours d’exploration dans le cadre du projet DEPART (Ifremer/ UM2-ECOSYM/ Agence de l’eau RMC/ Région LR/ EC2CO).

 

RESTOLAG Restauration des écosystèmes lagunaires : évaluation du rôle du sédiment et des herbiers à phanérogames. Ouisse Vincent, Fiandrino Annie, De Wit Rutger, Malet Nathalie (2013).http://archimer.ifremer.fr/doc/00166/27774/ [9]

 

Bilan du Réseau de Suivi Lagunaire

Après treize années de fonctionnement, le bilan du Réseau de Suivi Lagunaire est positif à plus d’un titre. En tant que réseau fédérateur (science / gestion / pouvoir public / financeurs), le RSL a fourni le cadre indispensable à la mise en œuvre d’une approche écosystémique de la gestion des milieux eutrophisés. Cette approche intégrée, nécessairement fondée sur l’observation pérenne de l’écosystème, a permis :

 

 

  • Contact

Matthew Hébert

[email protected] [10]

 


[1] [11]SBSE : Stir Bar Sorptive Extraction

[2] [12]POCIS : Polar Organic Chemical Integrative Sampler

[3] [13]DGT : Diffusive Gradients in Thin-films

[4] [14]Le NQE sont des valeurs seuils réglementaires (au titre de la Directive Cadre sur l’Eau) de concentration en deçà desquelles la molécule ciblée ne présente pas de risque connu pour l’environnement, les organismes et la santé humaine. Toutes les substances ne disposent pas de NQE.