Date de publication : 26/04/2017
L’ADENA, association gestionnaire de la Réserve naturelle nationale du Bagnas a asséché l’étang principal du site pendant l’été 2016. La gestion de cet étang est artificielle mais suit un rythme saisonnier. Elle cible en particulier le développement et le maintien d’une roselière d’une centaine d’hectares. Cet habitat accueille plusieurs espèces d’Ardéidés nicheurs (Hérons pourpré, Blongios nain…) et offre un refuge important pour la Rémiz penduline lors des migrations post-nuptiales.
L’assèchement est une mesure de gestion classiquement mise en œuvre pour favoriser la roselière qui pâtit paradoxalement du maintien prolongé de niveau d’eau trop haut nécessaire à la nidification de certaines espèces.
Cependant, mener un assec total, même naturel (par évaporation de l’eau) n’est pas sans impact sur la faune / flore du milieu.
Le gestionnaire et ses partenaires (comité scientifique (CSRPN), comité consultatif de la réserve, Tour du Valat, DREAL, DDTM, AFB (ex ONEMA), association de pêche..) ont identifié des points de vigilances en amont de la mise en assec :
- L’assec a débuté après la période de nidification des oiseaux,
- Pour préserver la Cistude d’Europe et l’ichtyofaune, le gestionnaire a maintenu en eau les canaux périphériques comme « zone refuge » et a mis en place des suivis ciblés sur leurs conditions physico-chimiques (T°, pH, O2, salinité). Les suivis classiques (oiseaux, hydro) ont été poursuivis,
- Une communication importante a été menée auprès de la population locale et des visiteurs pour les sensibiliser à cette mesure de gestion.
L’état d’assec en roselière est obtenu fin juillet et a duré 3 mois d’après les mesures du gestionnaire. L’étang s’est complètement asséché entre le 5 septembre et le 17 octobre.
Sans surprise, la modification de la gestion de l’eau pour l’assec a influencé la fréquentation du site par l’avifaune
Comparaison des moyennes mensuelles et intervalles de confiance à 95% calculées à partir de 20 ans de suivis hebdomadaires (1995-2015) sur le graphe en haut et calculées à partir des données de comptages décadaires de l’année 2016 sur le graphe en bas.
- En été, les niveaux d’eau plus bas qu’une année type rendent les vasières plus accessibles, le nombre d’oiseaux est alors plus important : on dénombre par exemple jusqu’à 500 Echasses blanches (contre 50 les autres années en général),
- A partir du mois de septembre, l’étang est totalement asséché, les oiseaux d’eau désertent le Bagnas. Moins de 2000 individus sont comptabilisés en septembre contre 8000 en général,
- En hiver, malgré la remise en eau de l’étang, les ressources alimentaires tels que les herbiers semblent manquer : peu de canards, de foulques et de grèbes sont observés.
Le point noir de cet assec est la mortalité de poissons constatée. L’effet combiné de la quantité de poissons réfugiés dans les canaux restés en eau, de l’été particulièrement sec, du manque d’oxygène dans l’eau et des remontées de sel a provoqué 2 vagues de mortalité massive de milliers de poissons : des carassins, muges, carpes, silures, mais aussi des anguilles…
Quelle stratégie d’assec pour demain ?
Le bilan est mitigé. Bien que la mise en assec ait été réussie, la mortalité de poisson associée encourage à une réorientation de la stratégie de gestion.
Les bénéfices pour la roselière seront mesurés d’ici 1 à 2 ans via le suivi rezo du rozo. Cette année, le Conservatoire Botanique National Méditerranéen étudie les macrophytes de l’étang afin de mesurer l’impact de l’assec sur la diversité des characées et phanérogames notamment.
L’impact sur l’ichyofaune pose question sur la future stratégie de gestion :
- Faut-il poursuivre la désalinisation de l’étang entamée il y a plus de 20 ans pour favoriser la roselière ou la limiter afin de favoriser des espèces plus adaptées aux changements de conditions de vie ?
- La stratégie d’assec peut-elle mieux intégrer la préservation des poissons ?
Suite à la concertation menée avec les différents partenaires, le gestionnaire testera dès 2017 une gestion différente. L’objectif est d’atteindre une salinité autour de 10g/L en été afin de privilégier des espèces résilientes. Les hauteurs d’eau devront être assez basses pour le permettre mais suffisantes pour satisfaire les enjeux faune (poissons et oiseaux). La roselière devrait être à nouveau asséchée mais de façon moins importante qu’en 2016. Cette gestion vise également à être plus proche d’un fonctionnement naturel de la lagune.
L’assec de l’été 2016 aura permis au gestionnaire d’affiner la gestion hydraulique de la réserve mais également de fédérer un groupe de travail dédié à cette thématique.
- En savoir plus
Télécharger le Bilan de l’assec
Télécharger la présentation du 14 mars 2017 (Rencontre gestion-recherche « Les poissons en lagunes : quel état des connaissances, pour quelle gestion ? »>> En savoir plus)
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ADENA
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