Une méthodologie pour hiérarchiser les actions
Date de publication : 28/05/2013
Sur le littoral les espèces invasives sont nombreuses, les situations variées et donc les possibilités d’agir multiples. Dois-je cibler la célèbre Herbe de la Pampa ou plutôt une espèce émergente comme la Réglisse ? Via le projet LAG’Nature, le CEN L-R a élaboré une méthode de hiérarchisation multicritères, outil d’aide à la décision. De plus, des fiches d’identificationdes 62 espèces végétales envahissantes les plus rencontrées dans les habitats lagunaires et dunaires ont été élaborées
Au cours du projet Life+ LAG’Nature, des inventaires ciblant les espèces envahissantes ont été réalisés, l’objectif étant de connaître la répartition des espèces au sein des 5 sites Natura 2000 lagunaires du projet. Devant l’ampleur du phénomène sur le littoral (diversité de situations, nombre d’espèces et de sites concernés) et conscients de la limite des moyens du projet et des gestionnaires en général, une hiérarchisation des actions à mener nous est apparue indispensable.
La méthode se base sur un système de notation par points intégrant plusieurs critères. La dangerosité de l’espèce permet de cibler les taxons les plus impactant sur les milieux à enjeu. L’effectif et la répartition de l’espèce permettentde cibler les taxons à effectif limité et spatialement peu répandus, donc de privilégier l’approche préventive (plus les travaux sont lancés tôt dans le processus d’invasion, plus ils sont efficaces). Ce premier niveau de hiérarchisation permet d’obtenir une note pour chaque espèce observée sur l’ensemble du territoire. Plus elle est élevée, plus l’intervention est importante.
Ensuite, nous avons cherché à prioriser par secteur les interventions au sein même du territoire. C’est le second niveau de la méthode qui consiste en une analyse cartographique cumulant deux critères. Le niveau d’enjeu de l’habitat permet de cibler les milieux les plus patrimoniaux pour le site Natura 2000 (enjeux définis par DOCOB). Le niveau d’invasion de l’habitat quant à lui permet de cibler les habitats peu ou pas envahis (approche préventive).
Puisque la méthode se veut un outil d’aide à la décision et non un carcan, des critères ‘souples’ sont injectés à cette hiérarchisation ‘fixe’. Par exemple, l’accès au foncier, élément déterminant pour réaliser des travaux, est une notion importante à prendre en compte. De même, il est souhaitable de considérer l’efficacité des techniques de lutte. Par exemple, on sait aujourd’hui que les arrachages manuels de Griffes de Sorcière sont efficaces à coût accessible. Ainsi, même si l’espèce est largement répandue autour de l’étang de Leucate et par conséquence sa note moyenne, son contrôle peut être une action prioritaire.
Au final, à chaque espèce sont attribués un type d’action (éradication, contrôle, inventaire, veille, non intervention ou alerte), une priorité d’action, des techniques de lutte et les secteurs où intervenir. L’aspect communication/sensibilisation est également précisé pour chaque espèce.
La méthode mise au point se base sur une approche multi-critères et constitue un outil d’aide à la décision. La démarche préventive, aujourd’hui reconnue comme plus efficace est privilégiée. Elle oriente les choix des gestionnaires vers les priorités d’action propres à chaque site et permet de mettre en adéquation les objectifs et les moyens. Cette mise en adéquation est indispensable sur les territoires littoraux fortement impactés par les espèces invasives.
Enfin, selon nous une prise de recul est nécessaire concernant cette thématique. On a trop souvent tendance à considérer l’espèce indésirable comme la cause du problème alors qu’en réalité il ne s’agit que de sa conséquence : n’oublions pas que ces taxons exotiques sont en majorité inféodés aux perturbations/dégradations des milieux – remblais, gestion de l’eau, surpâturage, piétinement, etc. Il est donc important de bien observer et comprendre ces éléments « facilitateurs ». Les Jussies sont une nuisance mais ne pourraient-elles pas aussi être la conséquence d’une dégradation de la qualité de l’eau ? Les Lampourdes … voir du côté d’un éventuel surpâturage, de remblais ou d’inondations.
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Crédits photos : Benjamin Sirot CEN LR