Faisant suite au programme LARIMED I (2019-2021), LARIMED II (financé par l’OFB et les DREALs Occitanie et PACA) a démarré en 2022 afin de maintenir l’effort de suivi des sites de nidification des colonies de laro-limicoles selon le protocole standardisé, mis en œuvre depuis 2011.
Ce protocole de suivi, permet d’estimer de manière précise des effectifs nicheurs de ces espèces sur l’ensemble de la façade méditerranéenne française, et d’estimer de manière objective (1) l’effectif nicheur réel sur la façade et (2) d’évaluer la productivité sur un maximum de sites. Il est optimisé sur le pic de nidification de ces oiseaux, partagé entre les équipes de suiveurs (suivi hebdomadaire des couples nicheurs de la 20e à la 24e semaine et estimation de la productivité basée sur le comptage des poussins de 3 et 4 semaines).
Chaque année le Conservatoire d’espaces naturels d’Occitanie réalise un bilan du suivi qu’il expose aux partenaires du programme, et relève auprès d’eux : les travaux de gestion menés sur les sites de reproduction (entretien des ilots, mise en défens), les problèmes rencontrés lors des suivis et partage les consignes à suivre pour la nouvelle saison.
L’évolution reste positive sur la façade française méditerranéenne pour 7 espèces sur les 9 suivies.
Les actions de restauration, de création d’ilots et de mises en défens des colonies conduites depuis 2011 en particulier dans le cadre des programmes Feder puis du Life+ ENVOLL, ont permis de retrouver des effectifs nicheurs, tels que ceux connus dans les années 1980, avec une stabilisation au-dessus de 20 000 couples pour la 3eme année consécutive, soit en 2022 : 24 186 couples recensés au pic d’installation (vs 22 303 en 2021).
Le bilan du suivi réalisé sur les 9 espèces nicheuses ciblées montre des tendances plutôt positives sur ces populations nicheuses particulièrement marquée pour la mouette rieuse et la sterne hansel.
Beaucoup d’échecs ont cependant été constatés pour les espèces qui s’installent sur des secteurs très fréquentés en haut de plage, sur ceux dont les assecs sont précoces ou encore ceux impactés par la prédation du hibou Grand-Duc ou du renard.
En résumé du suivi réalisé en 2022 par espèce :
- Goéland d’Audouin : installé sur une digue avec des difficultés d’accès (terrain militaire), la petite colonie retrouvée en Corse montre une progression faible, avec une quarantaine de couples qui ont produit des jeunes (moins de 60 couples nicheurs sont comptabilisés depuis 2017).
- Mouette rieuse : Plus de 4500 couples ont été dénombrés en 2022. Comparés aux 3700 couples de 2021 et 1850 couples vingt ans auparavant, la progression est forte pour cette espèce. 93 colonies installées assez précocement cette année et une installation synchronisée à peu près partout. L’espèce est quand même bien dispersée sur le littoral et également dans les terres, avec des effectifs plus importants dans l’Hérault et le Gard.
- Mouette mélanocéphale : Plus de 7600 couples et 34 colonies présentes au pic d’installation début juin. Cette espèce compte parmi celles à forte progression bien qu’elle ne réponde pas forcément aux aménagements réalisés pour les autres espèces. Les survols en drone ont permis de bien comptabiliser les effectifs en 2022. L’installation s’est faite dans l’Hérault et le Gard, à peu près partout en même temps (mais plus précocement sur l’étang de l’Or). L’Hérault absorbe beaucoup de ces colonies de mouettes. Des reports de colonies venant d’autres sites ont possiblement augmenté les effectifs totaux.
- Goéland railleur : Avec près de 2000 couples nicheurs au moment du pic d’installation, l’effectif de 2021 a été dépassé et la progression reste assez constante depuis 2011. L’installation était plutôt bien synchronisée. La dispersion spatiale de l’espèce est assez importante avec des effectifs répartis de l’Aude jusque dans le Var. Certains sites subissent encore des abandons (Aude) liés aux asséchements et la prédation, rendant la colonisation difficile, mais cette espèce semble être installée assez durablement sur certains territoires.
- Sterne pierregarin : Les effectifs ont dépassé les 2000 couples nicheurs, un nombre assez stable depuis 2015 et dont le plus gros des effectifs de colonie est situé dans l’Hérault. Cette espèce garde une progression fragile à l’échelle européenne, et le nombre de jeunes comptabilisé reste relativement faible. Les effectifs des 99 colonies recensées au pic sont présents sur l’ensemble de la façade, avec une bonne occupation des secteurs intérieurs (étangs). L’installation n’était pas synchronisée, avec un pic début juin. Les colonies ont rencontré des échecs et effectué des pontes de remplacement.
- Sterne naine : L’effectif nicheur s’est stabilisé autour de 1000 couples depuis 2016, notamment grâce aux travaux de construction et d’entretien d’ilots servant à leur nidification. Leur installation était assez synchronisée mais plus tardive (mi-juin) que pour la sterne pierregarin. La sterne naine rencontre énormément d’échecs, leur nombre de colonies (67 en 2022) bien répartie sur l’ensemble de la façade, est en forte baisse, car l’espèce reste fortement exposée au risque de dérangement et de prédation sur les plages qu’elles occupent. La réussite de ces colonies dépend aussi des efforts de mises en défens sur ses sites d’installation.
- Sterne Hansel : Avec près de 2000 couples en 2022, cette espèce a eu la progression la plus importante des sternes depuis 2011. Les colonies sont de plus en plus grosses, cette année 11 colonies ont été dénombrées au pic d’installation et souvent très grosses. Le pic d’installation est assez tardif. L’espèce est attirée par les zones terrestres pour y chasser.
- La Sterne Caugek : Plus de 3300 couples ont été dénombrés (retour d’effectif important comme en 2017 et 2019). L’installation était assez synchronisée partout sur les territoires et 11 colonies ont été comptabilisées au moment du pic d’installation, soit le double de 2021. Sur le lido de Thau, 3 colonies ont été dénombrées, représentant 80% de la population nicheuse concentrée sur ce territoire. L’espèce est revenue ces dernières années, donc le lido de Thau semble bien convenir pour leur nidification, même si les effectifs sont assez variables d’une année sur l’autre.
- Avocette : Avec plus de 1600 couples nicheurs, 2022 était une bonne année pour cette espèce, bien que beaucoup d’échecs et de réinstallations de colonies aient été observés. Le nombre de colonies a baissé mais les effectifs restent élevés. Sur cette espèce l’évaluation de la productivité est difficile à évaluer.
Conclusions :
- En 2022, les dates de pics d’installation des espèces sont restées dans les moyennes constatées depuis 10 ans.
- Les populations se portent plutôt bien pour la sterne Caugek, la sterne Hansel et le Goéland railleur. La plupart des effectifs nicheurs continuent de croître, mais sur les 9 espèces suivies, la progression de la sterne naine reste fragile. Le nombre de jeunes produits reste difficile à évaluer pour toutes les espèces car il est basé sur un nombre de couples pris en compte limité pour le calcul de la productivité. Il serait donc intéressant d’étudier de plus près les chiffres de cette productivité en lien avec la survie juvénile et immature afin de mieux comprendre les croissances observées.
- En 2023 les efforts de mise en défens des gestionnaires sont maintenus (ex : balises nautiques filets à Coudalère sur Salses-Leucate, mise en défens du grau à Pissevaches et Grande Maïre, lido de Vic avec 2 secteurs de mises en défens…)
- Pour rappel l’article publié en 2023 dans la prestigieuse revue Conservation Biology sur l’impact des actions de restauration ou de création d’ilots pour les laro-limicoles a montré que ces ilots se sont avérés à la fois attractifs et de bonne qualité pour les espèces ciblées, de sorte qu’ils n’ont pas créé de pièges écologiques. Au contraire, ces résultats permettent de conclure au succès de ce projet de restauration.
➡ En savoir plus : Restauration d’îlots : Des sites de nidification devenus attractifs grâce à un important effort collectif
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Olivier Scher
Coordinateur du programme LARIMED
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Les bilans sont disponibles en téléchargement sur le portail oiseaux marins de l’OFB