Le bassin versant de la lagune de Thau : 1 des 6 sites d’études
Date de publication : 29/04/2014
Introduction
La sortie du 5e rapport du GIEC (Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat) sur l’évolution du climat de notre planète en réponse à nos émissions de gaz à effet de serre repose la question des impacts du changement climatique et la nécessité de rechercher des pistes d’adaptation à moyen et long termes sur nos territoires français. Selon les projections climatiques, les pays Méditerranéens sont effectivement soumis à un risque élevé d’impact sur le bilan hydrique avec des conséquences sur la gestion des ressources en eau.
Dans ce contexte, un projet de recherche financé par la Commission Européenne (FP7/CE), CLIMB, a étudié l’impact du changement climatique dans 6 bassins versants de la Région Méditerranéenne :
Figure 1: Sites étudiés : La lagune de Thau (1) en France, le bassin de Rio Mannu di San Sperate (2) en Sardaigne en Italie, le bassin de Chiba (3) dans le Cap Bon en Tunisie, le bassin de Noce (4) en Italie, le bassin de Kocaeli dans la baie d’Izmit (5) en Turquie, le delta du Nil (6) en Egypte et l’aquifère de Gaza (7) dans les territoires palestiniens.
Le climat à l’horizon 2041-2070 sur Thau
Il existe plusieurs modèles climatiques globaux et plusieurs scénarios d’émissions de gaz à effet de serre. CLIMB a retenu 4 modèles climatiques pour la Région méditerranéenne (ECH-RCA, ECH-REM, ECH-RMO, HCH-RCA) et le scénario moyen d’émission de gaz à effet de serre (A1B1 selon les critères du GIEC). La période de référence considérée est 1971-2000 et les scénarios concernent la période 2041-2070.
Pour la lagune de Thau, les projections climatiques montrent, par rapport à la période de référence, que les températures de l’air vont augmenter entre 1,5 et 5°C. Cette augmentation sera plus forte en été qu’en hiver. En règle générale, les précipitations vont diminuer. On observe néanmoins des différences entre les saisons. La diminution est comprise entre 15% à 25% en hiver voire jusque 30% en été. Les incertitudes les plus fortes concernent le printemps puisque 1 modèle sur les 4 ne prévoit même pas de modification.
Figure 2: Figure montrant les précipitations et les températures selon les projections (2041-2070) par rapport à la période de référence (1971-2000) pour 4 modèles climatiques globaux régionalisés (ECH-RCA, ECH-REM, ECH-RMO, HCH-RCA) pour le scénario modéré A1B1 du GIEC et par saison (DJF : Décembre Janvier Février, MAM : Mars Avril Mai, JJA : Juin Juillet Août, SON : Septembre Octobre Novembre)
Les apports en eau douce à l’horizon 2041-2070 à la lagune de Thau
Sur le bassin versant de la lagune de Thau, malgré, il faut bien le rappeler, le manque de données hydrologiques sur le bassin versant, le flux d’eau douce venant du bassin versant a été modélisé et comparé à la période de référence. Le présent graphique montre le rapport entre la période de référence et la période future pour les différents mois de l’année. Tout comme pour les précipitations, les incertitudes restent importantes pour la période printanière. Toutefois, il y a une perte nette d’apports en eau douce pour l’été et l’hiver, la diminution moyenne étant comprise entre 20 et 40% du flux total.
Figure 3. Ordre de grandeur de la projection du changement de flux d’eau mensuel en provenance du bassin versant. La ligne noire représente la médiane c’est à dire que les valeurs se distribuent également de part et d’autre de cette ligne.
Impacts pour les activités socio-économiques
L’évolution du climat sur le bassin de Thau à l’horizon 2041-2070 selon le scénario modéré d’évolution des gaz à effet de serre A1B1 dans l’atmosphère montre à la fois une augmentation des températures de l’air et une diminution des précipitations et du ruissellement qui alimente en eau douce la lagune. Ces modifications climatiques peuvent avoir des répercussions sur les milieux et amener à des adaptations des usages. Tout d’abord dans la lagune, à ces modifications pourrait correspondre une augmentation de la température de l’eau et de la salinité des eaux de la lagune. Or on sait les coquillages sensibles à l’élévation de la température, notamment pour les élevages de moules. Ainsi, peut-être y aurait-il alors à retenir des espèces plus résistantes aux fortes températures et à la variabilité de la salinité. Sur le bassin versant maintenant, l’augmentation de la température peut générer, par une augmentation de l’évaporation, une diminution de la teneur en eau du sol. L’adaptation serait soit de retenir des espèces adaptées à la sécheresse soit d’installer des techniques d’irrigation encore peu développées. Enfin, la diminution du ruissellement peut conduire à une diminution de la recharge en eau des aquifères. Ceci pourrait obliger à limiter leur exploitation.
Parallèlement, toujours plus attirée par le patrimoine naturel accueillant d’un littoral ensoleillé, la population est appelée à poursuivre son augmentation dans cette Région. Il y aura donc aussi une augmentation de la demande en eau douce.
Cette conjonction de la diminution de la ressource et de la poursuite de la demande peut-elle conduire à des situations critiques de manque d’eau ? Contrairement à d’autres sites de la région méditerranéenne, le bassin versant de la lagune de Thau n’aurait pas à craindre pour sa disponibilité en eau douce. En effet, le projet régional AquaDomitia a anticipé l’augmentation des besoins par la connexion du bassin versant de Thau au Rhône par l’achèvement de l’extension du canal Philip Lamour. Depuis février 2012, des eaux brutes du Rhône sont notamment traitées à l’usine de potabilisation de Fabrègues puis diluées et distribuées aux habitants.
Néanmoins, si ce projet sécurise l’approvisionnement, on peut s’interroger sur son impact réel sur les usages. Face à une ressource toujours plus abondante, comment la population locale peut-elle se représenter la rareté locale de la ressource en eau et son origine ? Qui sait que l’eau qu’il boit sur le bassin versant de Thau vient un peu d’ici et beaucoup de là-bas ? L’économie d’eau est-elle un objectif ? Quelles sont les projections du changement climatique sur le débit du Rhône ? Finalement, à plus ou moins long terme, cette adaptation rend-elle plus ou moins vulnérable au changement climatique ?
- En savoir plus
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