Premier plan de gestion (2018-2027) du site
Le site des Marais de la Tête Noire bénéficie depuis février 2018 de son premier plan de gestion opérationnel. Le plan de gestion définit les enjeux et les objectifs à atteindre sur les 21 hectares du site pour les dix prochaines années.
La construction de ce plan de gestion a pu se faire grâce à la mobilisation remarquable des citoyens et associations locales … un exemple pour d’autres sites périurbains encore « orphelins » de toute gestion.
Contexte des Marais de la Tête noire
Bordant l’Étang de Vaïne (extrémité orientale de l’Etang de Berre), les marais de La Tête Noire constituent une enclave naturelle, entourée d’un complexe urbain, industriel et routier. Vestige d’une zone humide jadis beaucoup plus vaste, ce marais relictuel offre une belle diversité de milieux naturels structurés selon plusieurs gradients :
- de la terre ferme au milieu marin,
- du marais d’eau douce au marais salé,
- des milieux naturels à la ville et aux complexes industriels.
Le cœur des Marais de La Tête Noire appartenait, jusqu’en 2008, à la Compagnie des Salins du Midi, avant son acquisition par le Conservatoire du Littoral à hauteur de 17 ha. La commune de Rognac est également propriétaire de 4 ha du site.
Promouvoir une véritable gestion environnementale de ce site, ce souhait a été partagé avec Nostà Mar, une association de défense de l’environnement de Rognac. Celle-ci a à cœur de valoriser les richesses naturelles de ce site, et a été proactive pour la construction d’un partenariat avec le conservatoire du littoral et d’autres acteurs tel que la Fondation Eco-med.
Un site qui abrite des espèces animales et végétales emblématiques et rares
Le site des Marais de La Tête Noire présente une juxtaposition remarquable de milieux naturels sur une faible superficie : roselières, jonchaies, sansouïres, plages, prairies, pelouses, ruisseaux et ripisylves. Du point de vue de la diversité d’habitats et d’espèces présentes sur ce site:
- un ensemble de huit habitats d’intérêt communautaire sont présents dans l’aire d’étude élargie dont deux sont classés « prioritaires » : les lagunes côtières méditerranéennes et le marais à Marisque.
- une centaine d’espèces d’oiseaux est présente régulièrement dont deux espèces d’intérêt communautaire à effectif réduit qui nichent sur le marais : l’Échasse blanche et le Crabier chevelu. Les espèces protégées représentent plus de la moitié du cortège.
- la diversité herpétologique et batrachologique (cinq espèces chacun) et mammalogique (16 espèces connues dont une de chauves-souris) reste assez faible. L‘ichtyofaune compte en revanche 46 espèces de poissons (connus soit de l’Étang de Berre, soit du site).
- plus d’une centaine d’espèces d’invertébrés est d’ores et déjà connue sur le marais, sachant que la diversité spécifique totale du site dépasse très probablement le millier d’espèces. Deux insectes d’intérêt communautaire s’y reproduisent : l’Agrion de Mercure (libellule) et la Diane (papillon), tandis que d’autres espèces recensées sont très localisées en France tels qu’Ameles spallanziana,Cephalota circumdata ou Trochoidea trochoides. La Diane peut être considérée comme l’emblème des Marais de La Tête Noire, ce papillon étant bien implanté sur le site.
Les fonctions et services du marais
Les fonctions du site des marais de La Tête Noire sont de trois ordres :
- une fonction de conservation de la nature, notamment de réservoir de biodiversité, qui est intégré à la trame verte et bleue comme zone refuge, d’alimentation, de reproduction et de déplacement pour nombre d’espèces menacées et emblématiques du complexe lagunaire.
- une fonction de résilience écosystémique en raison du rôle de cette zone humide dans l’épuration des eaux de ruissellement arrivant à l’étang de Berre, la fixation des particules et l’absorption naturelle des eaux de pluies ;
- une fonction sociétale pour la population de Rognac et alentours car ces marais constituent, aux portes de la ville de Rognac, un véritable poumon vert permettant à la population de se ressourcer dans un paysage verdoyant et riche en fleurs, en insectes et en oiseaux.
Plan de gestion
Ce premier plan de gestion opérationnel du site a été élaboré en concertation avec les usagers et plus particulièrement avec l’association Nostà mar et la société de chasse de Rognac. Sa réalisation a été confiée, début 2017, à un groupement d’ingénierie écologique qui a conduit les investigations nécessaires au diagnostic du site, ainsi qu’un travail d’enquêtes auprès des acteurs locaux. Nostà mar a apporté son aide bénévole à Christophe Bernier en charge du plan de gestion pour le Conservatoire du littoral, notamment sur des comptages et observations d’espèces faites sur site pendant 5 ans.
Le Comité de pilotage du plan de gestion regroupe l’ensemble des acteurs concernés par la gestion du site (élus, associations, usagers…).
La mise en œuvre du plan de gestion sera assurée par la commune de Rognac.
Trois grandes orientations générales de gestion se dégagent :
- Améliorer la gestion hydraulique du marais (= restaurer le « bon état » de fonctionnement hydraulique du marais), ciblant les sous-orientations suivantes :
- Pollution de l’eau : raccordement des eaux usées au réseau d’assainissement de Rognac ;
- Approvisionnement en eau : sécurisation des écoulements provenant de la station des Barjaquets ;
- Ouvrages hydrauliques : création de martellières permettant de gérer l’ensemble des marais de La Tête Noire.
- Reconquérir les parcelles sous maîtrise foncière (= restaurer le « bon état » de fonctionnement écologique du marais), avec notamment :
- l’objectif de stopper la fermeture globale des milieux par des travaux d’entretien et de réouverture ;
- de mettre en place une gestion préservant les éléments de biodiversité à forts enjeux
- de favoriser des modes de gestion concertés et pérennes (pâturage, fauche, faucardage, etc) pour une gestion durable du site.
- Animer et encadrer les activités sur le marais : pour conforter et encadrer les « usages adaptés » aux sensibilités et aux enjeux relatifs au site.
Ceci implique principalement de mettre en place un conventionnement avec les acteurs locaux pour s’accorder sur les usages du site, mettre en place les équipements nécessaires à la gestion du public sur le site et enfin de mettre en place un dispositif de préemption sur le parcellaire de l’aire d’étude élargie.
Le site des marais de la Tête Noire devrait bénéficier à terme d’une gestion à la hauteur des richesses du site mais aussi des attentes de ses usagers.
Dans l’histoire de cette construction du plan de gestion, l’implication considérable de Nostà Mar est à souligner. En 10 ans d’existence, cette association a su mobiliser les acteurs et les pouvoirs publics pour que des projets de valorisation du site et de sensibilisation du public voient le jour. Les projets qu’elle a présentés, en partenariat avec la ville de Rognac, le Conservatoire du littoral et bien d’autres acteurs ont permis aux usagers de toutes générations, de mieux connaître et partager un site naturel proche de chez eux.
Il s’agit là d’une vision puis d’une expérience exemplaire de construction de l’avenir d’un site périurbain avec les citoyens… à suivre sur d’autres sites encore « orphelins » de toute gestion.